« Rebâtir la fraternité » Jean-Marie PETITCLERC

Ed. Salvator 2021

 

« Je ne saurais parler de la fraternité comme d’un concept mais d’abord comme une expérience vécue » prévient d’emblée l’auteur, religieux salésien et éducateur de terrain. C’est donc logiquement qu’il commence par raconter comment ses frères et sœurs l’ont aidé à grandir : des pages très personnelles qui illustrent bien la vie des fratries, ce mélange de concurrences et d’amitiés qui nous construit : « Je ne peux que rendre grâce pour ma famille : elle m’a permis d’expérimenter la fraternité, moi qui ai été si souvent témoin, dans ma pratique d’éducateur spécialisé, de tant de souffrances chez des jeunes qui se sont sentis trahis ou abandonnés par leur famille. »

Dans son action d’éducation, la mer tient une place privilégiée comme l’évoque la photo de couverture, nous le montrant avec un jeune à la barre d’un voilier : « La mer est une véritable école de la fraternité ». C’est ainsi qu’il rapporte le cas d’un jeune embarqué « qui avait tendance à vivre la mesure d’accompagnement éducatif dont il faisait l’objet sur le mode de l’assistanat et qui découvrait qu’on avait besoin de lui. »

On trouvera dans ce petit livre d’une centaine de pages accessibles des réflexions très actuelles : Comment situer la fraternité par rapport à la laïcité ce qui nous vaut un éclairage de la devise républicaine. Il en vient à préciser : « La solidarité n’est pas forcément signe de fraternité (…) La fraternité suppose bien sûr la solidarité. La fraternité ne se réduit pas à la solidarité, elle l’englobe ». Et à chaque fois sa pensée est illustrée par l’expérience : « Eduquer à la fraternité c’est éduquer au respect de l’autre. Je préfère cette notion à celle de tolérance, si largement diffusée aujourd’hui (…) Respecter l’autre c’est parfois se montrer intolérant vis-à-vis de ses actes… Il nous faut éduquer dans les repères. »

Tout un chapitre est consacré à son expérience à Chanteloup-les-Vignes en 1991 alors un des « sites les plus sensibles de notre République. » En comprenant ce qui se passait alors (et il nous l’explique) il mit en place une médiation avec ceux que l’on a appelé les « grands frères »… « La médiation permet de faire avancer la cause de la fraternité sur l’espace public ».

  1. Petitclerc est religieux, salésien de Don Bosco et c’est aussi l’un des intérêts du livre : « Je sais, pour ma part, que je n’aurais pas pu tenir quarante ans dans l’exercice du métier d’éducateur spécialisé, accompagnant des jeunes en grande difficulté, sans le soutien des frères de ma Communauté. » Il cite quelques conseils de Saint Jean Bosco, le fondateur des salésiens, qui inspirent son action.

On pourrait d’ailleurs prolonger astucieusement la réflexion par la lecture d’un de ses autres ouvrages paru en 2016 chez le même éditeur : « La pédagogie de Don Bosco ».