« La terre sera dévastée et elle se reposera durant soixante-dix ans, jusqu’à ce qu’elle ait compensé par ce repos tous les sabbats profanés ! » Il serait facile de transposer ce verset de 2 Chroniques 36, 19 en : l’économie sera dévastée et les hommes seront tenus confinés, pour tous les dimanches travaillés !

En effet, cette phrase des chroniques est prêtée au prophète Jérémie dont on sait tout le dur travail d’annoncer le malheur pour son peuple. Pourtant la citation vient plutôt de Lévitique 25,34. et 43.

Quand le Lévitique exhorte à pratiquer le repos hebdomadaire du sabbat, il prévoit aussi que les temps de dévastation seront à considérer comme des sabbats forcés pour le pays entier. Dans sa logique purement légaliste, le lévitique met un lien de cause à effet entre le non respect du sabbat (donc l’oubli du 3è commandement) et la terre dévastée !

Avec le Christ on sait que l’ancien testament n’est pas aboli, mais qu’il est transformé de l’intérieur. On ne peut plus donc faire des raccourcis rapides pour comprendre la situation actuelle du monde comme un châtiment divin. Mais inversement on ne peut pas dire : on fait ce qu’on veut, quand on veut…

En effet le Christ ne demande pas d’abandonner le repos hebdomadaire. Le dimanche n’est-il pas l’équivalent chrétien du sabbat ? Plus encore que respecter un commandement, le Christ nous demande de l’habiter, de le faire vivre[1]. Il me demande de repenser mon repos hebdomadaire ; et de me questionner quand je le détourne ou l’annule. Qu’est-ce que je fais quand je travaille le dimanche ? Je m’astreins au travail, et parfois même j’en suis fier !? Pourquoi m’asservir volontairement ? Pour gagner plus ? Et par là m’assurer ma propre survie ?…

Voilà que le Seigneur se re-propose à moi comme Celui qui me donnera la vie !  Il est le Dieu de la Vie. Ainsi le jeûne du vendredi saint est une façon de me poser une limite pour dire à Dieu combien je compte sur Lui. Lui seul me maintiendra en vie ; cette vie que je ne peux me donner à moi-même. Cela a beau être symbolique. Il y a là une vraie force spirituelle. Idem pour le repos dominical. Pâques va nous le rappeler en grand. Ce jour ne sera pas vide, car il sera un temps dédié à Dieu : dans les liturgies (même suivies à distance), dans l’allégresse d’une bonne table, dans la joie de penser (téléphoner) à mes proches, ma famille… ; et finalement de tout considérer comme un don de Dieu.

Et comme Dieu est Bon, le repos du dimanche de Pâques durera 8 jours ! C’est l’octave pascale. Avec cette logique on ne voit plus ce repos forcé comme le paiement d’un dû à un démiurge, mais simplement un immense don, une grâce inouïe. Amen, All… !

 

P Bruno Guespereau

[1] Pour autant j’ai un grand respect pour nos frères juifs qui font de chaque sabbat un jour très spécial. Il faudrait parfois s’inspirer d’eux pour mieux vivre notre dimanche !