Gloire à Dieu au plus haut des cieux !

Frères et sœurs, quel cadeau allons-nous offrir à Jésus aujourd’hui ? Quand on aime quelqu’un, on est heureux de lui offrir un cadeau, comme nous allons le faire ce soir ou demain autour du sapin avec nos proches. Et c’est encore plus vrai quand on célèbre un anniversaire, comme c’est le cas pour Jésus qui est né il y a un peu plus de 2000 ans. Il n’est peut-être pas venu au monde un 25 décembre mais peu importe, cette date a été choisie parce que les Romains y célébraient le sol invictus, le soleil vainqueur de la nuit qui reprenait le dessus sur elle après le solstice d’hiver. « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; et sur les habitants du pays de l’ombre, une lumière a resplendi. » (1° lect.) Le soleil illumine la terre, et Jésus illumine nos vies pour nous conduire vers le Royaume… Alors, que pouvons-nous lui offrir ? Ce qui lui fera le plus plaisir, c’est que nous acceptions de l’accueillir dans nos cœurs et dans nos vies. A Bethléem, il n’y avait pas de place pour lui et ses parents, qui étaient des étrangers venu de Nazareth… Il dérangeait. Nous aussi, il nous dérange parfois. L’accueillir, c’est toujours prendre un risque, celui de devoir nous convertir pour agir de façon juste. Aujourd’hui, beaucoup ont peur d’accueillir l’étranger, comme en témoigne le sort inacceptable de tant de migrants. Pourtant, accueillir l’autre, ou accueillir Jésus, c’est lui faire un cadeau pour en recevoir un bien plus grand encore. Car lorsque nous le recevons, le Fils de Dieu nous donne ce que nous désirons au plus profond de notre cœur : la vie divine. « Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu ». Jésus signifie Dieu sauve, Il nous sauve par les vertus qu’il infuse en nous (la foi, l’espérance et la charité) de tout ce qui nous empêche de vivre divinement, et en particulier de 3 fléaux : l’angoisse de la solitude, la peur de l’avenir, et la haine ou l’indifférence envers l’autre.

 

Pour commencer, Jésus nous sauve par la foi de l’angoisse de la solitude. Dans notre société, de plus en plus de personnes vivent seules, et beaucoup d’autres, bien que vivant en famille ou en compagnonnage, se sentent seules. Ce sentiment engendre de l’angoisse car « il n’est pas bon que l’homme soit seul. » (Gn 2,18) Paradoxalement pourtant, beaucoup s’enferment dans leur solitude, préférant chatter sur les réseaux sociaux avec des inconnus qu’avec leur voisin de palier ou même les membres de leur famille… En s’incarnant, le Fils de Dieu se fait proche de chacun et chacune d’entre nous, il est l’Emmanuel, qui se traduit Dieu-avec-nous. « Conçu de l´Esprit Saint, né de la Vierge Marie, il a vécu notre condition d´homme en toute chose, excepté le péché » (Prière Eucharistique IV). Et il est avec nous « tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20). Le rejet de Dieu par beaucoup a entraîné l’apparition de faux dieux (l’argent, le plaisir, le pouvoir…) qui n’empêchent pas la solitude, mais au contraire l’augmentent. La foi nous permet de ne jamais être seuls en étant toujours unis au Christ. « Voici que je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui ; je prendrai mon repas avec lui, et lui avec moi. » (Ap 3,20). Lorsque nous accueillons Jésus, c’est la Trinité tout entière qui vient : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui et, chez lui, nous nous ferons une demeure. » (Jn 14,23) Et bien sûr le Père et le Fils viennent toujours avec l’Esprit Saint, si bien qu’on vit ainsi le plus beau des repas de famille. Le mot « foi » vient de l’hébreu amen, qui a les mêmes racines que les mots « rocher » mais aussi « vérité » (emet) et « confiance » (emouna). Croire en Jésus, Fils de Dieu, signifie s’arrimer solidement au rocher de la vérité et de la confiance.

 

Ensuite, Jésus nous sauve par l’espérance de la peur de l’avenir. Nous vivons dans un monde désenchanté, qui a abandonné l’illusion du progrès continuel qui animait les hommes des siècles précédents, et qui a pris conscience que notre planète risque d’être de plus en plus abîmée et finalement détruite. C’est sur le terreau de la peur que fleurissent les théories complotistes. Mais le Seigneur nous redit, comme Il n’a cessé de le dire aux hommes tout au long de l’histoire: « n’ayez pas peur » (la parole qui revient le plus souvent dans la bible)! Non seulement le Seigneur est avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde, mais en plus il nous guide vers le Royaume et il nous donne son Esprit qui transforme les hommes. Certes, l’adversaire jette partout de l’ivraie, mais le Seigneur continue inlassablement de semer les graines de son Royaume qui, mystérieusement, se construit. Nous, chrétiens, « ce sont de nouveaux cieux et une terre nouvelle que nous attendons selon sa promesse, où la justice habitera. » (2 P 3,13) Sur quoi fonder notre espérance ? Sur le fait que Dieu a tenu ses promesses. La naissance du Messie avait été annoncée par le prophète Isaïe des siècles plus tôt : « Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné ! Sur son épaule est le signe du pouvoir ; son nom est proclamé : ‘Conseiller-merveilleux, Dieu-Fort, Père-à-jamais, Prince-de-la-Paix’. » Puisque la 1ère partie de la prophétie s’est réalisée, nous pouvons espérer la réalisation de la 2nde : « le pouvoir s’étendra, et la paix sera sans fin pour le trône de David et pour son règne » (1° lect.). Dans nos maisons, le sapin est le symbole de notre espérance de la vie éternelle.

 

Enfin, Jésus nous sauve par l’amour de la haine et de l’indifférence. Notre société est fragmentée par de multiples divisions. Elles ont toujours existé, mais les réseaux sociaux les ont exacerbées car ils favorisent le développement de « réseaux de pensée » entre personnes qui ont des idées semblables et qui n’entrent plus en dialogue avec d’autres…  L’Enfant de la crèche ne fait rien pour le moment, mais un jour, il se laissera clouer sur une croix pour nous témoigner de son amour. Sur les icônes orientales, ses langes représentent déjà les bandelettes du linceul. Et dans nos églises, la couronne de l’Avent a symbolisé sa couronne royale, qui est aussi la couronne d’épines… C’est par amour que le Fils de Dieu s’est incarné : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » (Jn 3,16) Ce mouvement de kénose, c’est-à-dire d’abaissement, se poursuivra jusqu’à la croix car « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » (Jn 15,13)

 

Ainsi, frères et sœurs, « le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » pour nous apporter le plus beau des cadeaux, le salut, qui signifie non seulement être sauvé de toutes les formes de mal (en particulier l’angoisse de la solitude, la peur de l’avenir, la haine et l’indifférence) mais aussi et surtout partager sa vie divine. Autrement dit, il s’est offert lui-même à nous. Alors nous aussi, aujourd’hui et tous les jours de notre vie, offrons-nous nous-mêmes à lui, offrons lui des cœurs grands ouverts où il pourra demeurer sans cesse. Comme nous ne pouvons plus laisser les migrants mourir en mer ou ailleurs, nous ne pouvons plus laisser le Christ exclu de nos vies. Tous les cadeaux que nous allons recevoir ce soir ou les jours à venir, aussi précieux qu’ils soient, finiront par s’user et disparaître. Mais le cadeau du salut est éternel, il ne s’usera que si nous n’en faisons rien. En fait, plus nous le partagerons avec nos frères, plus nous en profiterons. Comme la Vierge Marie, saint Joseph, les bergers et bientôt les mages, comme le bœuf et l’âne et tous les animaux, et comme tous les anges dans le ciel qui ont su l’accueillir, louons le Seigneur de tout notre cœur en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime » !

P. Arnaud