Le Saint Sacrement… Nous célébrons aujourd’hui le mystère de l’Eucharistie, « source et sommet de toute la vie chrétienne »1 comme le dit le concile Vatican 2. Encore un mystère, après celui de la Sainte Trinité la semaine dernière… Je ne vous fais pas l’affront de vous poser la question à main levée « qui a compris ce qu’est l’Eucharistie ? »… En effet, pour tous ceux qui auraient été tentés de lever la main, il aurait fallu leur dire que s’ils ont compris le Mystère, c’est qu’il y a une nuance qu’ils n’ont, en fait, pas vraiment comprise… Hé oui, comme tout bon mystère, le Saint Sacrement n’est pas entièrement compréhensible par notre esprit humain… Mais on peut, et c’est ça qui est beau, le contempler, l’explorer, l’inspecter, le vivre, le faire vivre, le partager… Bref, on peut vivre une relation avec ce mystère.

Essayons d’entrer plus avant dans notre relation avec l’Eucharistie. Dans la 2e lecture, nous avons entendu saint Paul nous transmettre le récit du dernier repas de Jésus avec ses disciples au cours duquel il a, dit-on, institué l’Eucharistie. Il dit : « Ceci est mon corps, qui est pour vous. Faites cela en mémoire de moi ». Un des enjeux de l’Eucharistie, c’est bien cela : constituer le Corps du Christ. Et à ce propos, je ne résiste pas, sans doute comme tout prêtre au moins une fois dans sa vie, à vous citer saint Augustin qui parle si magnifiquement du Corps du Christ :

« Si vous voulez comprendre ce qu’est le corps du Christ, écoutez l’Apôtre (autrement dit, saint Paul), qui dit aux fidèles : « Vous êtes le corps du Christ, et chacun pour votre part, vous êtes les membres de ce corps » (1Co 12,17). Donc, si c’est vous qui êtes le corps du Christ et ses membres, c’est votre mystère qui se trouve sur la table du Seigneur, et c’est votre mystère que vous recevez. À cela, que vous êtes, vous répondez : « Amen« , et par cette réponse, vous y souscrivez. On vous dit : « Le corps du Christ« , et vous répondez « Amen« . Soyez donc membres du corps du Christ, pour que cet Amen soit véridique. »2

« Vous êtes le corps du Christ », « devenez ce que vous recevez », … Ça vous rappelle sans doute les paroles de quelques chants de communion que l’on chante de temps en temps à la messe. Que cette fête en l’honneur du Saint Sacrement vienne réveiller et raviver notre conscience de cela. Lorsque nous communion à la messe, nous faisons cette démarche de faire entrer Jésus une fois de plus dans nos vies, afin qu’il y prenne de plus en plus de place. Mais nous oublions peut-être un peu plus souvent de penser qu’en plus de Jésus qui vient en nous, nous allons aussi en Jésus, puisque nous devenons membres de son corps.

Et ce qui est beau, c’est que tout cela : chacun de nous le fait. Alors vous pouvez regarder un coup à droite, un coup à gauche, et dites-vous que les personnes que vous voyez deviendront également le corps du Christ. Avec ces personnes, vous vous unirez à Jésus dans le même corps, tout à l’heure en recevant le Saint Sacrement.

(Lorsque j’ai entendu un prêtre dire cela en homélie un jour, bien avant que je devienne moi-même prêtre, j’ai regardé à droite et à gauche : il y avait des copains. Alors, je me suis dit : « Ça va, ambiance plutôt coole dans le corps du Christ ! ». Puis, je ne sais pas ce qui m’a pris, mais j’ai regardé aussi derrière au fond de l’église, et il y avait un type que je ne pouvais pas voir en peinture ! Je me suis alors dit : « Oh non, je vais aussi devoir me le coltiner celui-là ??!! ». Je n’avais finalement peut-être pas le cœur aussi prêt que ça pour faire communion…)

Bref, communier, c’est beau, mais tout comme l’amour, c’est aussi beau que c’est exigent !

Chers Frères et Sœurs, chers Co-membres du Corps du Christ profitons de cette célébration où le Saint Sacrement est particulièrement mis à l’honneur pour nous laisser bousculer par ce mystère, pour reprendre conscience de quelques petites réalités spirituelles que nous pouvons oublier dans nos habitudes dominicales. Demandons la grâce, lors de cette Eucharistie, d’avoir un cœur prêt à communier une fois de plus à notre Seigneur Jésus. Profitons, tout à l’heure du temps de la présentation des offrandes, pour présenter en même temps au Seigneur nos cœurs toujours meurtris par le péché, comme une offrande à purifier. Enfin, nous ressortirons de cette église à la fin de cette messe en nous sachant corps du Christ, comme une vivante hostie consacré, pour partager la Vie de Jésus à l’extérieur.

Je conclus avec les paroles de la chanson bien connue :

« Nous sommes le corps du Christ, Chacun de nous est un membre de ce corps. […] Dieu nous a tous appelés à la même sainteté, […] Dieu nous a tous appelés à l’Amour et au pardon Pour former un seul corps baptisé dans l’Esprit. […] Nous sommes le corps du Christ. »

1Concile Vatican 2, Lumen Gentium, §11.

2Saint Augustin, Sermon 272.