Toutes ces histoires d’appel de disciples sont vraiment étonnantes. Visiblement, tous sont appelés à suivre Jésus, mais tous n’arrivent pas à répondre à cet appel… Et puis, parmi ceux qui ont réussi à répondre à l’appel, tous n’arrivent pas non plus à faire ce qu’il faut…

Je m’explique… Dans la 2e partie de l’évangile, Jésus rencontre 3 hommes et ce sont 3 situations différentes. À propos du 1er homme, on nous dit que « en cours de route, [il] dit à Jésus : « Je te suivrai partout où tu iras » ». Et Jésus lui répond que ça va être dur, mais il peut venir… On nous dit ensuite que c’est Jésus qui interpelle le 2e en lui disant « Suis-moi ». L’autre a l’air intéressé, mais il a besoin de temps parce qu’il a un truc important à finir. Et Jésus lui dit de laisser tomber : ce n’est pas si important, face à l’urgence de s’abandonner au Père en « [partant pour annoncer] le règne de Dieu ». Dur, dur, … Peut-être même plus dur que pour le 1er homme… Enfin, le 3e homme, (comme le 1er) tout feu tout flamme, dit de lui-même « Je te suivrai, Seigneur »… Mais il y a un « mais »… : « mais laisse-moi d’abord faire mes adieux aux gens de ma maison ». Il veut bien s’abandonner, MAIS pas totalement… avec des conditions… Là, pour le coup, visiblement, c’est niet ! « Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le royaume de Dieu. » Quelle dure réaction que voilà…

Et puis après on a « les disciples Jacques et Jean » qui ont déjà répondu à l’appel, qui suivent déjà Jésus, puisqu’ils sont disciples. Ils demandent l’autorisation de déclencher un cataclysme pour détruire un village qui ne les a pas accueillis… La miséricorde et le pardon, ce n’est visiblement pas encore acquis, pour eux… Alors, Jésus les réprimande pour éviter le pire…

On pourrait encore citer l’appel d’Élisée par Élie qui fait écho à ceux de l’évangile…

Bref… Que peut-on retenir de cela ? Je crois que nous pouvons trouver la clef de lecture dans l’épître de saint Paul, la 2e lecture : « Vous, frères [et sœurs], vous avez été appelés à la liberté ». Si le Christ nous appelle à le suivre, c’est pour nous libérer de tout le reste : « c’est pour que nous soyons libres que le Christ nous a libérés », nous dit encore saint Paul.

On le sent bien dans notre expérience de vie spirituelle, nous n’arrivons pas toujours à nous aligner parfaitement avec l’Évangile. Même si on ne le voit pas toujours, il y a « le péché [qui est là, tapis dans l’ombre,] à [notre] porte. Il est à l’affût » (Gn 4,7) et il vient nous donner des petits coups discrets chaque fois que nous sommes à sa portée. Ainsi, « il y a là un affrontement qui vous empêche de faire tout ce que vous voudriez », selon saint Paul. D’un côté, Dieu cherche à nous élever, nous glorifier, et de l’autre, le péché cherche à nous faire trébucher, nous faire sombrer… Et nous, au milieu, écartelés dans cet affrontement, affaiblis et fatigués par les assauts du péché…

« Les tendances de la chair s’opposent à l’Esprit, et les tendances de l’Esprit s’opposent à la chair » nous rappelle saint Paul. Eh oui, le revoilà l’Esprit, le Saint-Esprit de Dieu, que nous avons particulièrement fêté il y a 3 semaines lors de la Pentecôte ! Nous avons fait mémoire du don de l’Esprit aux disciples du Christ, dont nous faisons partie. Nous avons prié pour que nous sachions ouvrir nos cœurs à le recevoir. Nous nous sommes remis en route pour une vie dans l’Esprit-Saint.

Alors, cet « affrontement [dans la chair] », dont parle saint Paul, « qui [n]ous empêche de faire tout ce que [n]ous voudri[ons] », nous pouvons l’apaiser, nous pouvons le calmer en « march[ant] sous la conduite de l’Esprit Saint » ! En effet, saint Paul nous dit : « marchez sous la conduite de l’Esprit Saint, et vous ne risquerez pas de satisfaire les convoitises de la chair ».

Chers Frères et Sœurs en Christ, prenons au sérieux cette exhortation de l’Apôtre en cherchant à toujours plus nous ouvrir à l’Esprit-Saint, le laisser de plus en plus pénétrer dans nos vies, dans nos intimités… Vivre dans l’Esprit, c’est l’assurance de se laisser guider par un bon berger. Vivre dans l’Esprit, c’est l’assurance de rester disponible aux appels du Christ et de répondre avec générosité. Vivre dans l’Esprit, c’est l’assurance de vivre auprès de Jésus, d’être inspirés à agir comme Lui agirait.

Demandons cette grâce particulière pendant cette Eucharistie (pendant le temps de méditation juste après cette homélie, par exemple) : la grâce de nous laisser façonner par l’Esprit de Dieu qui est en nous, de nous laisser configurer toujours plus au Christ.

Ô Esprit-Saint, viens en nous, afin que tu puisses faire rayonner la Bonne Nouvelle de la Résurrection par toute notre vie ! Amen !