« Qui enverrai-je ? qui sera notre messager ? » – « Me voici : envoie-moi ! » Drôle de réaction du prophète Isaïe… D’habitude, les prophètes ont un peu plus de mal à répondre positivement à leur vocation, à l’appel que Dieu leur fait…

  • Moïse auprès du buisson ardent : « Qui suis-je pour aller trouver Pharaon, et pour faire sortir d’Égypte les fils d’Israël ? » (Ex 3,11) et au chapitre suivant du livre de l’Exode, il insiste : « Pardon, mon Seigneur, mais moi, je n’ai jamais été doué pour la parole, […] j’ai la bouche lourde et la langue pesante ! » (Ex 4,10)

  • Le prophète Jérémie : « Ah ! Seigneur mon Dieu ! Vois donc : je ne sais pas parler, je suis un enfant ! » (Jr 1,6)

  • On se souvient également de Jonas, qui, après l’appel de Dieu, ne dit rien et « se leva, mais pour s’enfuir […], loin de la face du Seigneur » (Jon 1,3).

  • Élisée : « Laisse-moi embrasser mon père et ma mère, puis je te suivrai. » (1R 19,20)

Bref, rares sont les prophètes qui ont montré autant d’enthousiasme qu’Isaïe pour répondre aux missions que le Seigneur leur a donné… De manière générale, cela semble plutôt bien représentatif des manières que l’on a tous de répondre aux appels incessants de Dieu dans notre quotidien. Souvent, on se trouve des excuses (comme Moïse), on se trouve incompétent (comme Jérémie), on procrastine (comme Élisée), voire, on tourne volontairement le dos en faisant semblant de ne pas avoir entendu (comme Jonas)… Qu’on se le dise, on n’est pas souvent très bon dans ce domaine…

Qu’à cela ne tienne ! Ce n’est pas ça qui va arrêter le Seigneur ! Il en a vu d’autres ! Il a réussi à composer avec chacun de ces prophètes afin de leur permettre de remplir leur mission malgré tout. Alors croyons bien que, avec chacun d’entre nous, le Seigneur saura trouver comment nous faire prophétiser ! Regardez Saint Paul, il a commencé par persécuter les chrétiens : Ce n’était franchement pas gagné, non seulement qu’il devienne chrétien, mais encore plus qu’il devienne un évangélisateur, un prophète… Réécoutons ce que l’apôtre (qui se qualifie d’avorton) nous dit aujourd’hui : « ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu, et sa grâce, venant en moi, n’a pas été stérile. Je me suis donné de la peine plus que tous les autres ; à vrai dire, ce n’est pas moi, c’est la grâce de Dieu avec moi. »

Frères et Sœurs, avec ce témoignage de Saint Paul, croyons-nous vraiment en cette force de la grâce de Dieu ? Voulons-nous vraiment répondre à cette vocation de baptisé d’être prophète ? Voulons-nous vraiment suivre Jésus ? Ces 3 questions n’en sont en réalité qu’une seule…

Quelle joie de suivre ce Dieu tendrement proche de chacun d’entre nous. Nous pouvons reprendre les paroles de Saint-Paul lorsque nous discutons avec notre entourage : « Avant tout, je vous ai transmis ceci, que j’ai moi-même reçu : le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Écritures, et il fut mis au tombeau ; il est ressuscité le troisième jour conformément aux Écritures, il est apparu à Pierre, puis aux Douze ; ensuite il est apparu à [plein d’autres personnes, des saints et des personnes ordinaires]. Et en tout dernier lieu, il est même apparu à l’avorton que je suis. » Et personnellement, j’ajouterais : « et il m’a dit : je t’aime ».

Et vous, qu’allez-vous ajouter à cette dernière phrase lorsque vous témoignerez ? « Et en tout dernier lieu, il est même apparu à l’avorton que je suis » et il … Il a fait quoi ? Il m’a dit ceci ou cela ? Il m’a fait vivre ceci ou cela ? Il m’a fait comprendre telle ou telle chose ? Il m’a invité à ceci ou cela ? Etc. L’expérience vécue avec le Seigneur vous est propre, et il y a sans doute autant de fins à cette phrase qu’il y a de personne dans cette église.

Frères et Sœurs, j’ai un petit rêve que je vous partage : Je rêverais qu’à la fin de cette messe, en se saluant et en se souhaitant un bon dimanche, vous me disiez chacun les quelques mots que vous mettriez à la fin de cette phrase… « Le Seigneur m’a dit [ceci]. » ; « Le Seigneur m’a invité à [cela]. ». Ça risque d’être un petit peu long, mais tellement beau. Si je suis envahi de paroissiens (ce que j’espère), n’hésitez pas à le partager à quelqu’un d’autre, ça fera l’affaire ! Et après l’avoir partagé une fois, ça sera facile pour chacun de nous de le partager encore et encore, de dire dans le monde entier les merveilles que le Seigneur fit pour nous. Ça sera notre façon d’avancer au large avec Jésus et de jeter les filets, comme Simon-Pierre dans l’Évangile. Ça sera notre manière de répondre à l’appel du Seigneur de la première lecture « Qui enverrai-je ? Qui sera notre messager ? », et nous pourrons répondre tous en chœur comme le prophète Isaïe : « Me voici : envoie-moi ! »

Frères et Sœurs, dans la suite de cette célébration eucharistique, demandons la grâce au Seigneur de nous aider à relire notre vie, pour repérer ces moments où nous l’avons rencontré, et où nous avons vécu quelque chose de spécial avec Lui. C’est cela qu’il faut raconter, c’est de cela qu’il nous faut témoigner. Prenons le temps, pendant ces quelques instants de méditation, de faire remonter cela à notre mémoire, et de rendre grâce.