TÉMOINS

Lorsque des gens puissants et sans trop de scrupules veulent faire taire ceux qui les gênent,  le plus simple est d’utiliser l’intimidation assortie de quelques menaces pour faire peur. C’est ainsi que les chefs du peuple, les Anciens et les scribes s’y prennent avec Pierre et Jean qui répandent la nouvelle de la résurrection de Jésus. Impuissants devant la proclamation de la vérité, ils s’efforcent par la menace « d’en  limiter la diffusion dans le peuple ».

Quelquefois, ça marche.

Mais, constatant leur assurance « et se rendant compte que c’était des hommes sans culture et de simples particuliers, ils étaient surpris. »

Qui de nous n’a pas croisé sur son chemin une personne qui l’a ainsi surpris parce que c’était quelqu’un de vrai ? Il est des gens, quelque soit par ailleurs leur culture et leur statut social, dont la parole sonne vrai. Ils disent ce qu’ils ont à dire. Ils ne provoquent pas. Ils ne donnent pas envie de leur répliquer mais plutôt de faire silence.

Deux exemples :

–Dans l’évangile de Mathieu il est dit de Jésus qu’il parlait avec autorité et non pas comme les scribes (Mt 7,29–cf. Jn 7, 46)

–J’aime aussi ce personnage d’un roman de Soljenitsyne dont il souligne en terminant le rayonnement paradoxal :

« Elle n’avait pas accumulé d’avoir pour le jour de sa mort. Une chèvre blanc–sale,  un chat bancal, des ficus….

Et nous tous, qui, vivions à ses côtés, n’avions pas compris qu’elle était ce juste dont parle le proverbe et sans lequel il n’est village qui tienne.

Ni ville.

Ni notre terre entière. »

[La Maison de Matriona, Julliard 1971]

C’est par des paroles à la fois sobres et solennelles que les deux apôtres répondent aux menaces :

« Quant à nous, il nous est impossible de nous taire sur ce que nous avons vu et entendu. »

Pierre et Jean devaient donc être parmi les premiers d’une longue lignée de témoins (martyrs) de la foi. Il me vient par exemple à l’esprit la sobriété des paroles de Sainte Jeanne d’Arc ou la tranquille assurance de Sainte Bernadette : « Je ne suis pas chargée de vous le faire croire mais de vous le dire.»

Cependant, cette belle assurance de nos deux apôtres peut surprendre lorsque nous découvrons la finale de l’Évangile selon Saint-Marc : la fragilité des premiers témoins. « Ils refusèrent de croire » le témoignage de Marie-Madeleine ainsi que celui des deux disciples qui avaient vu le Ressuscité.

Que s’était est-il donc passé entre-temps ?

La Pentecôte. La venue de l’Esprit promis par Jésus.

Dans cet épisode du livre des « Actes des apôtres », tout avait commencé par une guérison au nom de Jésus. Pierre et Jean  avaient dû préciser en posant la question : « Pourquoi nous regarder, nous, comme si c’était par notre puissance ou par notre piété personnelle que nous avions fait marcher cet homme ? » (Actes 3,12)

« Ouvrons nos cœurs au souffle de Dieu

Car il respire en notre bouche

Plus que nous-mêmes. »

P. Christophe