Gloire à Dieu au plus haut des cieux !

Frères et sœurs, quel cadeau allons-nous offrir à Jésus ? Quand on aime quelqu’un, on est heureux de lui offrir un cadeau, comme nous allons le faire ce soir ou demain autour du sapin avec nos proches. Et c’est encore plus vrai quand on célèbre un anniversaire, comme c’est le cas pour Jésus qui est né il y a un peu plus de 2000 ans. Alors, que pouvons-nous lui offrir ? Ce qui lui fera le plus plaisir, c’est que nous acceptions de l’accueillir dans nos cœurs et dans nos vies. A Bethléem, il n’y avait pas de place pour lui et ses parents, qui étaient des étrangers venus de Nazareth… Il dérangeait. Nous aussi, il nous dérange parfois… L’accueillir, c’est parfois accepter de se décentrer, de s’ouvrir à l’inconnu. Mais accueillir Jésus, c’est lui faire un cadeau pour en recevoir un bien plus grand encore. Car lorsque nous le recevons, le Fils de Dieu nous donne ce que nous désirons au plus profond de notre cœur : le salut (Jésus signifie Dieu sauve) qui est aussi la vie divine. « Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu » (Jn 1,10). Jésus nous sauve par les vertus qu’il infuse en nous (la foi, l’espérance et la charité) de tout ce qui nous empêche de vivre divinement, et en particulier de 3 fléaux : l’angoisse de la solitude, la peur de l’avenir, et la haine ou l’indifférence envers l’autre.

 

Pour commencer Jésus nous sauve, par la foi, de l’angoisse de la solitude. Dans notre société, de plus en plus de personnes vivent seules, et beaucoup d’autres, bien que vivant en famille ou en compagnonnage, se sentent seules. Ce sentiment engendre de l’angoisse car « il n’est pas bon que l’homme soit seul. » (Gn 2,18) En s’incarnant, le Fils de Dieu se fait proche de chacun d’entre nous, il est l’Emmanuel, qui se traduit Dieu-avec-nous. « Conçu de l´Esprit Saint, né de la Vierge Marie, il a vécu notre condition d´homme en toute chose, excepté le péché » (Prière Eucharistique IV). Et il est avec nous « tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20). Notre cœur, comme la nature, a horreur du vide, c’est pourquoi le rejet de Dieu par beaucoup a entraîné l’apparition de faux dieux (l’argent, le plaisir, le pouvoir…) qui n’empêchent pas la solitude, mais au contraire l’augmentent. La foi nous permet de ne jamais être seuls en étant toujours unis au Christ. « Voici que je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui ; je prendrai mon repas avec lui, et lui avec moi. » (Ap 3,20). Dans notre époque tellement troublée, certains estiment que Dieu nous a abandonnés, mais en fait, c’est nous qui le laissons seul, comme Jésus fut abandonné par beaucoup de ses disciples au moment de sa Passion. Et il ne s’impose pas, comme avec les disciples d’Emmaüs lorsqu’il fit « semblant d’aller plus loin » (Lc 24,28) pour leur laisser la liberté de l’accueillir ou non. Mais lorsque nous l’accueillons, nous goûtons comme eux la joie, qui les a fait retourner à Jérusalem retrouver les autres disciples. Même un ermite comme le fut saint Charbel, dont c’est la fête aujourd’hui (il est mort la nuit de Noël), n’est jamais seul car il sait que Dieu est avec lui.

 

Ensuite Jésus nous sauve, par l’espérance, de la peur de l’avenir. Nous vivons dans un monde désenchanté, qui a abandonné l’illusion du progrès continuel qui animait les hommes des siècles précédents, et qui a pris conscience que notre planète risque d’être de plus en plus abîmée et finalement détruite. Mais le Seigneur nous redit, comme Il n’a cessé de le dire aux hommes tout au long de l’histoire : « N’ayez pas peur ! » (la parole qui revient le plus souvent dans la bible) ! Le Seigneur nous guide vers le Royaume et nous donne son Esprit qui transforme les hommes. Certes, l’adversaire jette partout de l’ivraie, mais le Seigneur continue inlassablement de semer les graines de son Royaume qui, mystérieusement, se construit. Nous, chrétiens, « ce sont de nouveaux cieux et une terre nouvelle que nous attendons selon sa promesse, où la justice habitera. » (2 P 3,13) Sur quoi fonder notre espérance ? Sur le fait que Dieu a tenu ses promesses. La naissance du Messie avait été annoncée par le prophète Isaïe des siècles plus tôt : « Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné ! » (1° lect.) Puisque la 1ère partie de la prophétie s’est réalisée, nous pouvons espérer la réalisation de la 2nde : « le pouvoir s’étendra, et la paix sera sans fin pour le trône de David et pour son règne ». Dans nos maisons, le sapin est le symbole de notre espérance de la vie éternelle.

 

Enfin, Jésus nous sauve, par l’amour, de la haine et de l’indifférence. Notre société est fragmentée par de multiples divisions. Et les guerres, en Ukraine, en Palestine et ailleurs, déchirent notre humanité…  L’Enfant de la crèche ne fait rien pour le moment, mais un jour, il se laissera clouer sur une croix car « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » (Jn 15,13). Sur les icônes orientales, ses langes représentent déjà les bandelettes du linceul. Et dans nos églises, la couronne de l’Avent a symbolisé sa couronne royale, qui est aussi la couronne d’épines… Le roi Hérode craignait qu’il lui prenne son pouvoir, c’est pourquoi il a fait tuer tous les enfants de Bethléem, mais en fait, le Roi de l’univers ne veut régner que par l’amour. « Le jour où le pouvoir de l’amour dépassera l’amour du pouvoir, le monde connaîtra la paix » disait le Mahatma Gandhi. Bâtir la fraternité entre toutes les créatures, voilà l’enjeu essentiel des derniers temps qui sont les nôtres. « Les hommes ont appris à voler dans le ciel comme des oiseaux, ils sont capables de nager dans les océans comme des poissons, mais ils ne savent pas encore marcher sur la terre comme des frères » (Martin Luther King). La crèche avec tous ses personnages est un symbole de cette fraternité : Marie et Joseph renvoient au peuple juif, les bergers aux pauvres et aux exclus, les mages aux riches, aux savants et aux étrangers, l’âne et le bœuf aux animaux… et tous les autres santons à notre humanité dans sa diversité, rassemblée avec les anges autour de l’Enfant-Dieu. Cette humanité ne deviendra une seule famille que lorsque nous lui ressemblerons : « Si vous ne changez pas pour devenir comme les enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. » (Mt 18,3) Devenir comme des enfants, c’est renoncer à nos désirs de domination pour accepter de dépendre les uns des autres.

 

Ainsi, frères et sœurs, « le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » (Jn 1,14) pour nous apporter le plus beau des cadeaux, le salut, qui signifie non seulement être sauvé de toutes les formes de mal mais aussi et surtout partager sa vie divine. Autrement dit, il s’est offert lui-même à nous. Alors nous aussi, ce soir et tous les jours de notre vie, offrons-nous nous-mêmes à lui en l’accueillant dans des cœurs grands ouverts où il pourra demeurer sans cesse. Et n’oublions pas que l’accueillir signifie accueillir notre prochain, en particulier celui qui nous dérange ou que nous aimons moins… Tous les cadeaux que nous allons recevoir ce soir ou les jours à venir, aussi précieux qu’ils soient, finiront par s’user et disparaître. Le cadeau du salut ne s’usera jamais mais il sera inutile si nous n’en faisons rien. En fait, plus nous le partagerons avec nos frères, plus nous en profiterons, comme un bon repas qu’on préfère partager avec ses proches plutôt que de manger seul. Avec les anges et les autres personnages de la crèche, louons le Seigneur de tout notre cœur en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime » ! Notre joie et notre reconnaissance au Seigneur seront les plus beaux cadeaux que nous offrirons à Jésus, mais aussi à ceux que nous aimons.

P. Arnaud